mardi 29 mai 2012

LA DROITE LA PLUS BÊTE DU MONDE


Il y a plus de cinquante ans (en 1956) un certain Guy Mollet, présidant aux destinées de l’embryon du parti socialiste (la SFIO) d’alors (sous feu la 4ème République), déclarait avoir eu à faire à « la droite la plus bête du monde ». Curieusement cette réflexion est, à peu près, la seule chose qui nous soit restée de cet anglophile de gauche. Et cette survivance, fait encore plus étrange, s’est poursuivie malgré qu’elle n’ait cessée d’être démentie par les faits. 

En effet, à peine deux ans plus tard (en 1958), la droite allait occuper le pouvoir pour ne plus le lâcher (ou presque) au cours des cinq décennies qui allaient suivre. On pouvait donc tout dire, à son sujet, sauf qu’elle était bête.
Car il faut bien davantage de talent pour se maintenir que pour arriver. Certes ce talent lui fut davantage profitable qu’à la France et quand viendra le temps de faire le bilan du gaullisme la colonne du passif s’alourdira singulièrement. Mais en attendant la droite de gouvernement aura su faire preuve d’une aptitude à se maintenir rarement atteinte dans l’histoire de la République.

« Si nous ne faisons pas de bêtises nous serons encore au pouvoir dans 20 ans » affirmait le ministre du général, Alain Peyrefitte. Et il n’avait pas tort. Car quand, en apparence, la droite n’était plus au pouvoir ses idées l’étaient. Ainsi du tournant libéral du socialiste François Mitterrand, à peine deux ans après son élection. Ainsi des deux co-habitations de droite qu’il eut à avaler. Ainsi du social-libéral Jospin, pourtant venu de l’ultra gauche. Et il aura fallu 51 ans pour qu’un peu de crédit vienne sur la remarque du « Sfiotiste ». Mais il n’y était plus pour grand-chose. Le problème auquel la droite a à faire face est simple : comment gagner des élections quand on représente une classe privilégiée et ses idées alors qu’une majorité d’électeurs est issue d’un milieu opposé ? La réponse est simple : ne montrer aucune attache avec ladite classe, paraître même mépriser ce qui la distingue : l’argent. « La politique de la France ne se fait pas à la corbeille» disait le général et le socialiste François Hollande ne pouvait faire moins : « mon ennemi c’est la finance ! ». Non seulement dans les paroles, mais aussi dans l’attitude. Origine simple, attitude égalitaire sont les clés d’une campagne électorale réussie et d’un mandat à renouveler. Ce fut le legs politique de Pompidou à Chirac. Et, entre les deux, Giscard y perdit son destin en s’y essayant avec maladresse.

Mais un certain Sarkozy pensa que les temps nouveaux étaient venus et qu’il pourrait s’affranchir de ces règles de droite. Le yacht de Bolloré, la soirée du Fouquet’s, le mariage à l’Elysée avec une « people »... autant de comportements qui révèlent cette rupture et, pour tout dire, une forme de bêtise que Guy Mollet dénonçait sur sa droite. Et avec lui ses suiveurs. Les vizirs qui veulent être « califes à la place du calife ».
Parmi les principaux, François Fillon au profil si bas que l’évènement improbable qui le propulserait sur le devant de la scène lui passera largement au dessus de la tête. Un autre François, Copé, jouant les « eunuques de harem » avec l’UMP, là où se trament tous les complots. Et que dire d’un Alain Juppé, « le meilleur de la droite » (quid des autres !!!) qui ira échanger son maigre retour de crédit contre un malheureux plat de lentilles ministériel !
Gageons que la bagarre qui va s’ouvrir entre eux ne sera pas indigne des coups de bâton de Polichinelle.

Quand à la gauche, qui semble ne plus goûter au caviar, elle parait avoir fait sienne ces anciennes règles de droite. Et il se pourrait bien, dans ces conditions, qu’une alternance de 50 ans vienne de s’ouvrir.

jeudi 17 mai 2012

LETTRE OUVERTE




                                                                                     Monsieur le Président de la République 
                                                                                     59, av de Ségur 
                                                                                     75007 PARIS

Monsieur le Président,

Il y a huit mois (le 08.09.2011) notre site publiait le 1er de trois articles (la crise et les fauteurs de crise ; Un Munich cannois ; Vers l’Europe allemande ?) qui devaient être par la suite réunis sous format d’un livret, Triples A pour triples ânes, dont vous trouverez ci-joint un exemplaire. Ce « petit précis de sortie de crise" est, depuis votre élection, plus d’actualité que jamais. En effet le troisième article se concluait par «IL NE FAUT PAS RATIFIER CE TRAITE », il s’agissait, bien évidemment, du traité de Bruxelles des 8 et 9 décembre 2011. Or il est manifeste que nous partageons, sur la question, un même point de vue. Mais quid de la suite à laquelle vous serez confronté sous quelques jours ?

Rappelons brièvement le constat : 
- le traité de Maastricht n’autorise pas la BCE à prêter aux Etats membres, 
- l’endettement global de ces Etats membres dépasse les dix mille milliards
d’euros (dont 1 800 milliards pour la France), 
- le remboursement de 50% de cette dette, en admettant que les budgets nationaux deviennent excédentaires, prendrait une centaine d’années, 
- ce traité ne profite qu’à un seul pays de la zone euro : l’Allemagne
(pour plus d’explications voir « Triple A pour triples ânes »)

Il faudrait donc changer le statut de la BCE pour qu’elle puisse racheter, au moins, 50% des dettes souveraines à des taux compris entre 0 et 1% (ce qui contribuerait aussi à faire chuter l’euro et donc booster les exportations). Mais plus facile à dire qu’à faire ! L’Allemagne opposera son véto car il y va de son dogme « monétariste » et de sa suprématie en Europe.


Faut-il alors, comme l’ont suggéré Marine le Pen et Dupont Aignan, sortir de l’euro ? Evidemment pas, mais entre ces deux extrêmes il existe une troisième voie, la création d’un euro bis (à ma connaissance le traité de Maastricht n’impose pas le monopole d’une seule devise en Europe). Euro bis ayant les mêmes fondements que l’euro actuel (sauf pour ce qui concerne la clause d’exclusion de prêts aux Etats membres), et fixant sa parité et sa convertibilité avec l’euro actuel.

A cette fin il suffit d’obtenir l’accord de plusieurs Etats de la zone euro et signer un nouveau traité. Et sur cette question il ne devrait pas y avoir de difficultés à réunir une dizaine d’entre eux.


Conséquences: deux devises convertibles entre elles, l’euro et l’euro bis, circuleraient, dans un premier temps, en Europe (et dans le monde). Mais la première finira par céder le pas à la seconde suivant la loi de Gresham et s’effacer des circuits d’échanges.
L’euro bis permettra d’apurer une partie des dettes souveraines sans effets inflationnistes, en raison de sa convertibilité à parité. Par contre il entrera dans les circuits d’échange avec une décote sur les marchés par rapport à l’euro actuel, ce qui favorisera les exportations de la zone euro bis.

A l’intérieur de la zone euro le déséquilibre des échanges ira en se rééquilibrant, l’Allemagne perdant son avantage compétitif du à la fixité des changes.
Dernier avantage, cette idée d’un euro bis n’aura peut être même pas à être mise en œuvre, l’Allemagne (et d’autres Etats hors de l’euro) se trouvant bien forcée, sous la menace, de devoir accepter une révision drastique du traité de Maastricht.


C’est avec plaisir que nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de notre considération la plus distinguée.


G BOUDIN de l’ARCHE

mercredi 9 mai 2012

Quand la sociologie politique devient une science exacte (2)


Le 7 février dernier, trois mois avant le 2ème tour de l’élection présidentielle, notre site rendait public un long article, « Une élection déjà jouée» prétendant pouvoir déduire des précédentes élections (2002 et surtout 2007), et du dernier quinquennat, les résultats de l’actuelle, avec un haut degré de précision et en s’affranchissant des sondages. Au lendemain des 1er et 2ème tours il est donc temps de procéder à un comparatif entre ce qui fut anticipé et ce qui s’est produit.

La qualification du second tour

Il était indiqué « La participation pour 2012 sera supérieure à 2002 mais pas supérieure à 2007. Retenons l’hypothèse haute de 10 millions de voix pour la qualification du second tour ». Les derniers résultats connus donnent 80% de votants (35 000 000 d’électeurs, environ) et 27% pour la qualification du 2ème tour, soit 9,45 millions.

Les qualifiés du 2ème tour

On pouvait lire « restent trois candidats (pour le second tour) : Nicolas Sarkozy, François Hollande et Marine le Pen », et,
« Pour cette dernière, la seule donnée réelle dont nous disposons sont les 5,5 millions de voix obtenues par son père au second tour de l’élection de 2002. La hausse de la participation, entre 2002 et 2012 (que nous estimons à 12%) devrait, par effet mécanique, la conduire à plus de 6 000 000 de voix. Au-delà nul n’est en mesure de le quantifier. Elle reste donc le grand mystère de la prochaine élection (mais qui n’affectera pas le résultat final, on le verra). Résultat : 18% soit.... 6 300 000 voix.

« Pour François Hollande les données réelles sont les 9 500 000 de voix obtenues par Ségolène Royal au 1er tour de 2007, chiffre qu’il devrait maintenir (et améliorer). Ainsi sa qualification pour le second tour paraît d’ores et déjà acquise ».
Résultat : 28.6%... 10 000 000 voix

« Nicolas Sarkozy avait établi un chiffre record de 11 400 000 voix, au 1er tour de 2007, qu’il ne pourra renouveler. Il perdra 1 500 000 de voix, celles des électeurs frontistes qui s’étaient portés sur lui directement au premier tour de 2007 + un nombre indéterminé de « déçus de Sarkozy » et de l’électorat le plus âgé. Probablement 1,5 millions de voix supplémentaires.

Il serait donc, en principe, qualifié pour le second tour. Mais rappelons qu’il peut encore se faire doubler sur sa droite par Marine le Pen ». 
Résultat : 27%... 9 450 000 voix

« Pour Nicolas Sarkozy partant d’une base comprise autour de 9 millions de voix, il faudra... doubler. » (pour être élu) « Il peut espérer, au mieux 50% des voix frontistes, soit 3 millions de voix. Mais il lui manque encore 6 millions de voix qu’il devra chercher au centre. Même en admettant que François Bayrou réalise un score de 7 millions de voix (ce qui est peu vraisemblable) et qu’il appelle à voter pour Nicolas Sarkozy (ce qui serait encore plus invraisemblable) 6 millions de voix représenteraient plus de 85% des voix centristes à récupérer. Est-ce possible ? La réponse est non !...

Ainsi Nicolas Sarkozy se trouve confronté à une configuration qui lui est hostile tant sur sa droite (Marine le Pen) que sur sa gauche (les deux François). Il sera dans l’impossibilité d’atteindre les 17 à 18 millions de voix indispensables à sa réélection... On peut donc soutenir, sans recours aux sondages, que l’élection de 2012 est déjà jouée et depuis longtemps »

Résultat de la démonstration : probant. Poser correctement les termes d’une équation de sociologie politique vaut mieux que des centaines de sondages pour résoudre des inconnues électorales et pour un coût... infinitésimal.